Colère des écologistes, plaintes des riverains, réticence des élus. La préfecture s’apprête à autoriser l’extension du centre d’enfouissement des déchets de Gournay, en Boischaut-Sud.

C’est un lieu désert et isolé, caché au sommet d’une colline du Boischaut-Sud, à l’écart de la commune de Gournay. L’installation, discrète, n’est trahie que par une odeur forte et la présence de sacs plastiques, que le vent projette contre les haies et clôtures de protection posées à cet effet. La Société d’exploitation de Gournay (SEG) (1), filiale du groupe Imerys, y détient le plus important centre d’enfouissement du département, habilité par l’État à recevoir 70.000 tonnes de déchets par an.

Le centre compte actuellement deux parties : Gournay I, en phase de post-exploitation ; Gournay II, en exploitation, qui arrive à saturation. La SEG a donc prévu Gournay III, une extension de quelque 14 ha de stockage supplémentaires, afin de pouvoir enfouir 85.000 t par an pendant vingt ans, en moyenne, le maximum annuel pouvant atteindre les 100.000 t.
La préfecture, sauf surprise, devrait autoriser cette extension. Pour preuve, le projet de décret a reçu un avis favorable, le 8 avril, du Conseil de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst), composé de techniciens de l’État et de représentant de la société civile.

La poubelle de la Creuse ?

Dominique Viard, porte-parole d’Europe Écologie-Les Verts y siégeait, en tant que représentant d’Indre Nature : « C’était ma première séance, je me suis abstenu. La politique de gestion des déchets dans l’Indre est basée sur des solutions passéistes,s’insurge l’écologiste. Au moment où l’on veut réduire les déchets à la source, on augmente les capacités d’accueil de ces mêmes déchets. C’est incohérent. »
Le plan départemental d’élimination de ces déchets a souhaité disposer de réserves d’enfouissement. De fait, grâce à l’extension de Gournay et celle du centre de la Coved, à Châtillon-sur-Indre (2), validée fin 2011, les capacités d’enfouissement indriennes s’élèveraient à 170.000 t. Problème, le conseil général prévoit que les déchets à enfouir n’atteindront que 106.000 t en 2015. Pour les écologistes, deux explications : soit les objectifs fixés ne seront pas tenus, soit les importations de déchets nécessitent ces surcapacités. En cinq ans effectivement, la Creuse voisine a fermé deux de ses trois sites d’enfouissement. 38.500 t de déchets par an seraient donc réorientées vers Gournay, pour un département qui en produit 55.000 t par an.
Des projets devraient résoudre le problème, comme une usine de méthanisation, à Guéret. Pour les matières sèches, Didier Bardet, conseiller général et président d’établissement public en charge du traitement des déchets de la Creuse, rapporte qu’un projet existe également avec une technique de dépolymérisation développée par la société Rocanda, à Châteauroux. En attendant, l’Indre, avec ses trois sites d’enfouissement, accueille les déchets creusois à bras ouverts.

(1) Sollicitée, la société n’a pas répondu à nos demandes d’informations. (2) La société Coved dispose également de 25.000 t de réserve à Vicq-sur-Nahon.

réactions

Roger Aufrère, maire de Gournay. « Le consentement de certains élus du conseil municipal a été compliqué à obtenir. Pour nous, c’était l’assurance de sauvegarder cinq emplois dans la commune. Mais je comprends les plaintes des riverains, qui se sont exprimés lors de l’enquête publique. »
Pierre Berthoumieux, adjoint au maire de Châtillon. « Lors de l’extension du site de la Coved, vers la commune du Tranger, les plaintes des riverains étaient nombreuses aussi. Mais la société travaille ici depuis plus de vingt ans, sans pollution avérée. »

NR du 19/04/2013